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Avec Casino Royale, les producteurs ont réussi leur pari : redonner à Bond ses lettres de noblesse. Ils ont eu la bonne idée de revenir à la source afin de procéder à un nouveau départ. Daniel Craig incarne donc un James Bond débutant, plus jeune et véritable tête brûlée. Bourrin dans l’action, sensible et sentimental, l’agent de sa majesté affiche un nouveau visage. Martin Campbell, dont c’est le deuxième film frappé du double 0 après Golden Eye réalise sans doute le meilleur long métrage de sa carrière. Le cahier des charges vieux de plus de 40 ans est modifié. On revoit à la baisse l’omniprésence féminine du générique (très graphique), on supprime les gadgets superflus, on se fiche de la cuillère ou du shaker, on adjoint à 007 un nouvel outil (le téléphone portable) et on ancre le film dans les années 2000, période dominée par la menace terroriste et la puissance des marchés financiers. Daniel Craig, longuement décrié à l’annonce de son élection crée son James Bond à lui, un homme physiquement préparé, au regard largement bleuté et à la démarche assurée. La vie du jeune espion ne tient qu’à un fil, le danger le suit comme son ombre. Depuis que la saga existe, c’est la première fois que sa profession est assimilable à un fardeau. D’habitude monolithique, le personnage apparaît ici beaucoup plus humain, il souffre, ressent, s’émoit, rit… Bond agit souvent par coup de tête, il fonce dans la mêlée et ne comprend pas toujours tout au premier coup. Insouciant et immature, il est efficacement épaulé par M (Judy Dench) très maternelle et bienveillante puis par Vesper Lynd (craquissimante Eva Green) dont il tombe éperdument amoureux. Subissant les sévices d’un méchant atypique nommé Le Chiffre (Mads Mikkelsen), Bond prouve qu’il est programmé pour souffrir, on comprend alors mieux le détachement dont il fait preuve dans les précédents films tant les terribles épreuves traversées dès sa première mission s’avèrent insurmontables. Casino Royale est assurément le meilleur film d’action de 2006. Certaines séquences très bien menées parviennent à faire frissonner le spectateur non habitué à une telle débauche de nervosité, de tôles froissées, de poursuites endiablées et de suspense insoutenable. Les temps morts ne le sont pas vraiment, une tension palpable domine le film de long en large et plusieurs scènes mettent les nerfs en péril. Inutile d’en dire davantage, vous avez compris ce qu’il vous reste à faire, agrippez-vous à l’arrière de la première voiture qui passe et foncez voir ce nouveau Bond, à la fois film d’action, d’espionnage et thriller.